Préface

La raison d'être de ce livre

 

Le livre que voici est une réponse à un ouvrage au destin assez exceptionnel, paru il y a dix ans environ.

Jugez-en. Il se trouve sur les rayons de la quasi totalité des librairies de Tunisie et du Maroc.

Il apparaît, aux Etats-Unis, entre les mains d'un jeune Egyptien qui désire influencer, sinon, convaincre, la jeune fille qu'il courtise.

Il occupe une place de choix dans la mosquée de Regent's Park à Londres juste en dessous du Coran et du Hadith.

La contribution de ce livre a été jugée assez importante pour que dès l'année 1983, l'original français ait été traduit dans les langues suivantes : anglais, arabe, indonésien, persan, serbo-croate, turc, urdu et gougrati.

C'est un jeune tunisien qui m'a parlé, pour la première fois, de ce livre écrit par un médecin français. Il me demanda : " Avez-vous déjà lu le livre du Dr. Maurice Bucaille, intitulé La Bible, le Coran et la Science ? Il examine à fond la Bible et le Coran. Il affirme même que le Coran est exempt d'erreurs scientifiques. "

Je pris la peine d'examiner le livre en question et m'aperçus qu'effectivement il contenait de nombreuses affirmations sur la Bible et sur le Coran.

Il est vrai que son auteur déclare :

" C'est en examinant très attentivement le texte en arabe que j'en fis un inventaire, au terme duquel je dus me rendre à l'évidence que le Coran ne contenait aucune affirmation qui pût être critiquable du point de vue scientifique à l'époque moderne. "(1)

Par contre j'ai été surpris de constater que lorsqu'il parle de la Bible, l'auteur ne fait état que de " contradictions, invraisemblances et incompatibilités ". Selon lui, il prétend que les spécialistes des sciences bibliques les ignorent généralement. Tout au plus, lorsqu'ils les mentionnent, " ils tentent de les camoufler à l'aide d'acrobaties dialectiques "(2).

Les musulmans ont réservé un accueil enthousiaste au livre du Dr. Bucaille, car s'il s'avérait exact, il servirait alors à consolider leur confiance dans le Coran et constituerait une sorte de deuxième témoin, la Science venant ainsi confirmer la véracité du message coranique.

mais le livre du Dr. Bucaille appelle un examen attentif. Car il me semble qu'il passe sous silence des arguments convaincants en faveur de la crédibilité et de la véracité de la Bible. II ne mentionne pas l'accomplissement des prophéties contenues dans la Bible.

Le Dr. Bucaille prétend qu'aucun des Evangiles n'est l'oeuvre de témoins oculaires.

Quant aux plus anciennes copies des Evangiles, il ne les mentionne qu'en quelques mots, donnant ainsi l'impression que nous ne disposerions d'aucun témoignage solide et digne de foi rendu au texte en notre possession.

L'auteur va même jusqu'à comparer, finalement, l'Evangile à la Chanson de Roland " qui relate sous un aspect romancé un événement réel "(3).

Ces idées viennent évidemment appuyer les principales affirmations des musulmans, à savoir que les chrétiens auraient modifié l'Evangile, qu'il n'existerait aucun témoignage irréfutable en faveur des paroles prononcées par Jésus, ni en faveur de sa vie.

Ces propos constituent une accusation sérieuse et grave ; mais comme je les avais maintes fois entendus dans la bouche de nombreux musulmans que j'ai fréquentés au cours de longues années passées en Afrique du Nord, je m'y étais tellement accoutumé qu'ils ne me troublaient même plus. Ce en quoi j'avais grandement tort.

En 1983, de passage à Londres, je me rendis au British Museum pour admirer le Codex Sinaïticus, l'une des plus anciennes copies complètes du Nouveau Testament, et qui date du milieu du IVe siècle. Je voulais photographier la page qui est reproduite au chapitre III de la section 3. Après m'être renseigné auprès du gardien, je me dirigeai vers la vitrine qu'il m'avait indiquée tout en réfléchissant à la meilleure manière de prendre une photo de ce livre sous verre, sans avoir des effets de reflet.

C'est alors que j'ai été littéralement fasciné par le livre ouvert devant moi.

Tandis que mes yeux étaient rivés sur les pages de ce manuscrit, mes oreilles résonnaient du cri " VOUS AVEZ FALSIFIE VOTRE BIBLE ", répété des centaines de fois. L'émotion m'étreignit et je fondis en larmes. Encore maintenant, tandis que j'écris ces mots, la même émotion m'envahit. Oh ! Combien j'aurais voulu toucher de mes mains ce précieux document! J'aurais eu l'impression de toucher les copistes, mes frères d'il y a plus de seize siècles. Bien qu'ils soient morts depuis si longtemps, j'avais le sentiment d'être en communion avec eux. J'avais là, devant les yeux, la preuve tangible et palpable que l'Evangile est aujourd'hui ce qu'il a toujours été.

Je n'ai pas eu l'autorisation de toucher ce trésor. Ce n'est pas faute de n'avoir pas osé le demander ! Mais on ne me l'a pas permis. Je me suis contenté alors de prendre ma photo et je suis reparti.

Ce présent ouvrage est donc en premier lieu une réponse aux deux analyses du Dr. Bucaille. Mais il poursuit un autre but. Il se propose d'examiner en profondeur, sur les plans intellectuel et émotionnel, les vraies divergences entre l'Islam et le Christianisme. Je vais illustrer cette affirmation par un exemple. Les musulmans déclarent que Muhammad intercédera en leur faveur. Cela constitue pour eux une consolation d'ordre émotionnel, car nul ne peut envisager, sans frayeur, de se trouver un jour, seul dans l'éblouissante clarté du Jugement de Dieu. Mais cette consolation est-elle fondée sur des affirmations claires du Coran ?

Les chrétiens soutiennent, eux aussi, que Dieu réconforte leur coeur et leur conscience, en plaçant leur espérance en Jésus qui est mort pour expier les péchés du monde entier et qui est vraiment vivant pour intercéder en faveur de ceux qui l'ont reçu comme Sauveur. Y a-t-il, dans l'Evangile, quelque chose qui vient justifier cette espérance ? Comme je l'ai indiqué précédemment, les musulmans prétendent que la Bible a été modifiée. Peut-on trouver une preuve de cette accusation soit dans le Coran, soit dans le Hadith, soit dans l'histoire ?

Si les deux livres en présence, à savoir le Coran et la Bible, diffèrent dans leurs affirmations, selon quels critères accordera-t-on foi à l'un plutôt qu'à l'autre ? Comment reconnaître un vrai prophète ?

Mais, qui suis-je donc, pour avoir l'audace d'aborder toutes ces questions ? Comme le Dr. Bucaille, je suis médecin. Comme lui, j'ai appris l'arabe, l'arabe de l'Afrique du Nord. Comme lui, j'ai étudié à fond le Coran et la Bible.

Néanmoins, certains des domaines abordés dans cet ouvrage sont hors de mes compétences. C'est pourquoi j'ai recherché les conseils de spécialistes dans les domaines aussi divers que ceux de l'astronomie, de la géologie, et de l'embryologie humaine. Dans la mesure du possible, j'ai essayé de ne pas commettre d'erreurs dans l'interprétation des faits. Si les sondes interplanétaires lancées pour étudier la comète de Halley rendaient périmées les informations concernant les météores, telles que je les ai présentées au chapitre I de la section 5, je demanderais au lecteur de faire preuve de patience.

J'ai demandé à des hommes dont la langue maternelle était l'arabe de bien vouloir examiner attentivement les études sur le sens des mots dans cette langue. D'autres amis et mon épouse ont accepté de consacrer beaucoup de temps à lire et à passer mon manuscrit au crible de la critique. Je leur en exprime ma plus vive reconnaissance. En dernière analyse, j'assume l'entière responsabilité du choix qui a été fait dans les pages de ce livre.

Dans la première section nous nous intéresserons aux présupposés et aux préjugés qui animent tout auteur. En ce qui me concerne j'adopte le présupposé suivant : La Bible est un document historique fiable, digne de confiance et la bonne nouvelle, l'évangile, qu'elle rapporte est vraie et authentique.

En abordant l'étude de la signification du Coran et de l'Evangile, je me suis efforcé de saisir le sens évident, celui qu'auraient sans doute compris ceux qui ont entendu pour la première fois ces versets lorsqu'ils furent communiqués.

J'ai essayé d'éviter le piège qui consiste à vouloir faire dire aux versets considérés ce que j'aurais souhaité qu'ils affirment. C'est au lecteur qu'il appartient de juger si j'ai parfaitement réussi à maîtriser mes partis pris.

Mais aussi pourquoi choisir ce terme de " présupposé " de préférence à d'autres, tels que : postulat, a priori, parti pris, hypothèse. Certains de ces synonymes conviendraient mieux dans la langue scientifique (hypothèse, postulat), d'autres, en philosophie. Mais le lecteur n'est sans doute pas un spécialiste de ces sciences. Il comprendra sans doute mieux les expressions "préjugé" ou "partis pris" ou "présupposé". Comme, c'est dans de nombreux ouvrages en langue française, ce dernier terme qui revient le plus souvent et qu'il est donc d'une certaine manière "consacré" par l'usage et en même temps compréhensible à tout lecteur non initié aux finesses du langage des spécialistes, j'ai opté pour l'emploi de ce mot.

Nous vivons tous avec des présupposés. Mais il est bien inutile de les multiplier. C'est ce qu'a exprimé un philosophe anglais du 14e siècle, Guillaume d'Occam :

" Essentia non sunt multiplicanda praeter necessitam " c'est-à-dire " les présupposés (sur la nature essentielle des choses) ne doivent pas être invoqués au-delà de la simple nécessité. "

Nous vivons tous avec des présupposés, mais cette phrase, connue parfois sous le nom de "rasoir d'Occam" rappelle constamment qu'il faut, à la manière d'un rasoir ou d'un couteau, supprimer les présupposés inutiles et bien reconnaître ceux que nous utilisons.

Ayons présent à l'esprit que chaque fois que nous créons un présupposé, aussi infime soit-il, nous ouvrons une nouvelle voie dans un labyrinthe. C'est parce que nous sommes devant une impasse dans notre raisonnement que nous avons tenté une NOUVELLE piste à explorer.

Nous nous appuyons tous sur des présupposés pour résoudre des problèmes ou concilier des divergences. Nous verrons, par exemple au chapitre I de la troisième section, que les tenants de la " haute critique " ont fait le présupposé que Moïse ne pouvait pas connaître l'écriture.

De même, au chapitre II, le Dr. Bucaille présuppose que le mot " fumée " employé dans le Coran désignerait les gaz primitifs ; des savants chrétiens présupposent que le mot "eau" employé dans la Bible a le même sens.

Nous montrerons, au chapitre II de la quatrième section, que le Dr. Torki formule plusieurs présupposés dans son étude des sept cieux.

En soi, cette activité intellectuelle n'a rien de condamnable. Elle s'inscrit dans la recherche intellectuelle et le désir de trouver une explication à tout. Mais nous devons nous souvenir qu'il nous faut en limiter l'usage au strict nécessaire.

Enfin, voici pour finir quelques remarques sur l'usage des mots arabes dans ce livre. Les noms français des Sourates sont ceux que propose Muhammad Hamidullah dans sa traduction du Coran.

Pour la transcription des noms de Sourates et des autres nom arabes examinés et discutés dans le présent ouvrage, je me suis servi des symboles phonétiques internationaux.

Il y a cependant des exceptions. Pour les noms des auteurs arabes qui s'expriment et écrivent en français ou en anglais, j'ai conservé la forme latine qu'ils ont choisie eux-mêmes.

La transcription des noms arabes, tels qu'ils apparaissent dans les Hadiths, n'est pas toujours uniforme. Je me suis contenté de conserver la forme que le traducteur anglais ou français leur avait donné, sans vérifier dans l'original arabe.

Un certain nombre de mots arabes se sont glissés dans la langue française et sont revêtus d'une écriture universellement admise. C'est le cas des mots " Hégire ", " Chiite ". Quant aux autres, je me suis contenté de les transcrire en français, en conservant la phonétique des noms; ainsi, j'ai préféré Muhammad à Mahomet.

Après cette entrée en matière, le décor étant planté, efforçons-nous de jeter un nouvel aperçu sur la Bible et le Coran, à la lumière de la science moderne.

 


 Table des matières  chapitre suivant

Page d'accueil > Islam > Le Coran et la Bible

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1. La Bible, le Coran et la Science, éditions Seghers, Paris 1976, p.11. [retourner au texte]

2. Ibid., p12. [retourner au texte]

3. Ibid., p.112. [retourner au texte]